Les précipitations de mars n’ont pas été suffisantes pour combler le déficit observé depuis l’été dernier. Sans pluies abondantes d’ici fin juin, des arrêtés de restrictions pourraient être pris précocement
Les timides giboulées de mars n’ont donc pas été suffisantes. Depuis l’été dernier, la Nouvelle-Aquitaine, comme une grande partie du pays, souffre d’un déficit pluviométrique préoccupant. Mi-février, déjà, des responsables s’inquiétaient : « On prie un peu pour que le printemps permette de compenser ce déficit », admettait alors Hervé Servat, directeur adjoint de la Direction départementale des territoires et de la mer de la Gironde. « Si on a beaucoup de précipitations dans les 30 à 45 jours qui viennent, on sauvera la saison », espérait Franck Beroud, chef du département eau et ressources minérales à la DREAL (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement).
Deux mois plus tard, force est de constater que ces voeux n’ont pas été entendus. La pluie, ces dernières semaines, s’est faite rare. Les quelques précipitations observées en mars n’ont pas été assez abondantes pour rétablir un équilibre mis à mal par la sécheresse observée lors de la période de « recharge ». Durant celle-ci, en temps normal, les sols constituent leurs réserves en eau avant la saison chaude. Résultat : sans pluie abondante dans les semaines à venir, l’eau pourrait manquer cet été.
Des pluies insuffisantes en mars
Entre septembre 2016 et février, le déficit pluviométrique était déjà conséquent en Nouvelle-Aquitaine, avec un dégradé du nord au sud : il était ainsi de 49% en Charente-Maritime, 42% en Gironde, 36% en Dordogne, 34% dans les Landes et 18% dans les Pyrénées-Atlantiques. Le mois de mars, « excédentaire » en pluie dans le nord de la région mais « globalement proche des valeurs normales sur l’ouest » et « un peu supérieur dans le reste de la région », selon Météo France, n’a pas permis de compenser ce retard.
Comme souvent, c’est dans le sud de la région que les précipitations ont été les plus soutenues. « A Pau, on est à 113 millimètres de pluie contre une moyenne habituelle de 86 millimètres, soit un excédent de 30% environ », observe Bruno Mouchet, prévisionniste régional au sein de la station Météo France de Mérignac. Des excédents ont aussi été relevés à Dax, avec 117 millimètres pour une moyenne de 83, à La Rochelle (76 millimètres contre 54), Agen (96 pour 50) et Bergerac (80 pour 57). A Bordeaux, en revanche, les précipitations ont été « piles dans la moyenne, ce qui est très rare, avec 65 millimètres », reprend le prévisionniste.
« Ça a été un mois un peu plus pluvieux que la normale mais ça ne suffit pas car on rentre dans le printemps, avec des jours plus longs et une végétation qui pousse », rappelle Bruno Mouchet. Inquiétant car le mois d’avril est parti pour être désespérément sec. « Il n’a plu qu’en tout début de mois, avec des averses qui n’ont, toutefois, pas donné grand-chose. Et on a on a une configuration météo qui est propice à un temps sec et durable… »
Des cours d’eau au plus bas
A la Dreal, on regrette cette sécheresse et ses conséquences sur l’évolution des nappes phréatiques et des cours d’eau. Résolument prudents, les responsables refusent de se dire « inquiets ». Une volonté très claire de ne pas alarmer les usagers mais entre les lignes, on comprend que des précipitations sont ardemment souhaitées, sous peine de vivre un été particulièrement compliqué. Car s’ils ne sont pas encore dans le rouge, les voyants n’en sont pas moins à l’orange…
Les cours d’eau sont ainsi particulièrement scrutés. « Sur les principaux cours d’eau, les bassins versants de l’Adour, de la Dordogne, de la Garonne, de la Charente, de la Sèvre niortaise, de la Vienne et du Clain, on est entre 30 et 60% en-deçà du débit de référence », explique Sébastien Goupil, chargé de la politique et de la planification de l’eau et des ressources minérales à la Dreal.
Dans le détail, à la mi-avril, le niveaux des eaux était inférieur à la normale de 30% pour la Dordogne et la Sèvre, de 40% pour la Charente, la Garonne et le Clain, de 50% pour l’Adour et même de 60% pour la Vienne…
Des arrêtés de restriction précoces ?
L’ennui est que le réapprovisionnement en eau de ces fleuves, censé être assuré durant l’été par les nappes alluviales, ne coulera pas de source. Car ces nappes alluviales ne se portent pas beaucoup mieux. A l’exception de celles situées dans l’ex-Limousin, toutes celles de Nouvelle-Aquitaine sont remplies à des niveaux inférieurs aux normales habituelles.
« Si on a des précipitations conséquentes d’ici la fin du printemps, comme en juin 2016, ça pourrait arranger la situation, veut rassurer Sébastien Goupil. Mais si la situation actuelle perdure, on s’orienterait vers un étiage (niveau le plus bas des cours d’eau, NDLR) avec des niveaux de débit critiques dans les cours d’eau https://farmbrazil.com.br/gene…evitra-brasil/. Ça nécessiterait alors, selon les décisions des préfectures, de prendre des arrêtés de restrictions liées à certains usages pour garantir les besoins essentiels, notamment ceux en eau potable ».
« On n’en est pas encore là », s’empresse-t-il d’ajouter, précisant que « tous les usages sont pour le moment garantis ». Mais on comprend qu’en l’absence de « pluie soutenue » dans les prochaines semaine, la situation deviendra critique. « Des arrêtés de restrictions, il en est pris chaque année dans la région, pondère le responsable. Mais il est possible, vu la situation et cette recharge en eau insuffisante, que ces arrêtés de restrictions interviennent plus tôt » cette année.
Peu d’eau dans les réserves
Les nappes profondes, elles, ne sont pas les plus menacées car elles sont alimentées en eau à travers des cycles qui s’étalent sur plusieurs années. Mais, comme les autres, elles ont aussi « peiné à se recharger » ces derniers mois, admet encore Sébastien Goupil.
Les responsables de la Dreal sont en revanche plus préoccupés par l’état des réserves, ces retenues d’eau utilisées pour soutenir le débit des fleuves mais aussi pour assurer les prélèvements, notamment ceux de la végétation. « Le taux de remplissage de ces réserves est aujourd’hui compris entre 60 et 77% dans la région, en-deçà des précédentes années », reprend le technicien. A titre de comparaison, le remplissage de ces réserves, l’an dernier à la même époque, était « d’approximativement 90% ».
« On est dans une conjoncture difficile », résume Sébastien Goupil, qui dit « souhaiter » l’arrivée de la pluie. « Avec les nappes qui ne sont pas rechargées et des retenues artificielles dans le même cas, s’il n’y a pas d’eau liée aux précipitations, on ira vers une raréfaction de l’eau dans nos fleuves et rivières ». Autrement dit, à moins d’un changement radical de temps en juin, la Nouvelle-Aquitaine se dirige tout droit vers un été au régime sec.